La RSE est aussi un enjeu pour les Dircom

On 1 juin, 2023
4 min

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Wiztrust donne la parole à Emmanuelle Despres, experte en communication, qui a travaillé pour de grandes marques comme E.Leclerc, la Française des Jeux et Danone dans leur communication. Alors que la micro-influence prend de l’ampleur, les employés restent les premiers ambassadeurs d’une marque. Elle nous donne son point de vue.

Comment décririez-vous la mission principale d'un Dircom aujourd'hui ?

La recherche de sens et de cohérence est devenue la clé de notre métier. Le rôle du Dircom est de s’assurer de la cohérence d’une part entre le discours de l’entreprise et ses actes, en interne comme à l’externe, et d’autre part entre ce que propose l’entreprise et les attentes de la société. Finis les grands discours et les déclarations d’intention, les consommateurs attendent des actes concrets. Par exemple, plusieurs entreprises ont récemment annoncé des engagements d’ici 2025 vers des emballages réutilisables, recyclables et compostables. Pour les consommateurs, c’est trop loin ! Il faut des preuves plus concrètes, perceptibles directement dans l’acte d’achat. Et les entreprises dont les actions diffèrent des discours sont vite rattrapées par la patrouille ! Les ONG et les associations de consommateurs jouent un rôle efficace de vigie. Foodwatch a changé la donne avec ses pétitions en ligne.

Justement, en matière de RSE, sur quels aspects un Dircom est-il attendu ?

Notre rôle est d’organiser la communication autour du « purpose ». Les entreprises se dotent aujourd’hui d’une raison d’être qui, demain, engagera les consommateurs au-delà de la seule performance économique et financière. Le Dircom doit nourrir la réflexion autour de ce purpose et challenger les choix RSE. Il est le lien entre l’entreprise et le monde extérieur et peut contribuer à pousser plus loin un engagement ou identifier des actions responsables qui trouveront un écho plus fort dans le public.

Comment faire émerger son message sans qu’il soit noyé dans un flot ininterrompu d’infos, de prises de parole ?

Il doit y avoir une vraie exigence sur le message. Le but n’est pas de nourrir cette infobésité, mais de s’interroger pour justement partager un chiffre ou une information qui aura réellement de l’impact, qui est utile dans le débat, permet l’émergence et la différenciation.

Pensez-vous qu’il soit important pour une entreprise que ses employés soutiennent son message et son image de marque sur leurs réseaux ?

Ce qui est important, c’est que les salariés et Dircom comprennent la vision de l’entreprise et adhèrent aux choix qu’elle fait. L’entreprise doit être source de fierté pour le collaborateur qui y donne beaucoup de son temps et de son énergie. Et si cette fierté nourrit l’image de marque, l’approche est doublement gagnante !

Cela peut notamment jouer un rôle clé en temps de crise. Il y a quelques années, E.Leclerc avait dû gérer une crise, le rappel de steaks hachés contaminés par la bactérie E. coli. Les collaborateurs s’étaient immédiatement mis en action pour appeler eux-mêmes les clients de leur magasin. Ils ressentaient le besoin d’être les ambassadeurs de leur marque. Forte de cette mobilisation interne, la communication avait été rapide, efficace, transparente et personnalisée. Un peu plus tard, lorsque Danone a été visé par une enquête de Cash investigation, les collaborateurs ont eux aussi voulu défendre leur marque. Mais l'employee advocacy fonctionne s’il s’agit d’une démarche volontaire de salariés, positivement accompagnée par l’entreprise.

Comment les entreprises peuvent-elles s’appuyer sur l’employee advocacy ?

Chez Danone, nous avons mis en place une politique d’employee advocacy pour encourager les collaborateurs qui le souhaitent à partager et relayer nos contenus. Nous avons créé un cadre, avec des contenus à partager. Pour que cela fonctionne, il faut que les collaborateurs aient accès aux informations et se sentent autorisés à les partager.

Mais le travail d’advocacy se fait aussi dans la vraie vie. Le 21 septembre dernier, Danone a reversé l’intégralité de son chiffre d’affaires à des projets en faveur de l’agriculture régénératrice. On a proposé aux collaborateurs de venir en magasins pour parler directement aux consommateurs de cette initiative. Ils étaient 1500 à avoir fait le déplacement ! Cette démarche casse un peu les codes et insuffle plus d’authenticité dans la communication d’une marque.

Est-ce que ces nouveaux usages digitaux nécessitent plus de lâcher-prise ou au contraire plus d’attention ?

Les réseaux sociaux obligent les marques à une posture d’humilité, à une grande transparence et une vraie horizontalité. On ne fait pas que partager des contenus en suivant une communication descendante, on écoute ce que les gens ont à dire. Cette communication se distingue par son ton plus direct, elle peut connaître quelques ratés, mais on réajuste et on continue. C’est un leurre de se dire qu’on peut tout contrôler.

L’autre particularité de cette communication, c’est qu’elle génère des interactions, des débats voire une certaine confrontation auxquels les dirigeants n’étaient pas habitués. Ça bouscule pas mal ! Il faut savoir prendre du recul et hiérarchiser ses paroles : est-ce que cette personne qui m’interpelle est influente ? Quel impact ont ses propos ? Et on ajuste notre action. On ne réagit et on ne répond pas à tout. Bien sûr que tout le monde ne nous aime pas, mais c’est aussi ça qui nous fait avancer.

Le Dircom incarne-t-il nécessairement l'entreprise qu'il représente ?

Je ne pense pas. J’ai été formée par le Dircom de E.Leclerc qui est un homme de l’ombre, sans que cela n’affaiblisse son travail ou son influence. Il peut y avoir des Dircom qui sont davantage dans la lumière parce qu’ils aiment animer leur communauté sur les réseaux sociaux. Mais le rôle du Dircom est d’abord de servir la cause de l’entreprise. Il est son premier avocat, il doit donc être convaincu par les valeurs qu’elle porte.

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